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Photo du rédacteurJacques Heurtier

Une soirée bien arrosée

Dernière mise à jour : 16 juil. 2021

« D’abord, pourquoi le mot bientraitance ? Nous les servons, donc on devrait dire bienservance… »

La soirée avançait au galop. Clichés et aphorismes se joignaient au chœur des vestiges de la soirée.

Chaque verre, chaque bouteille, dans cette atmosphère surchargée de convivialité agrémentait les discours qui voletaient joyeusement d’une idée à l’autre. « Moi, si je leur dis que je suis satisfait de leur travail, ils ne progressent plus. Tu n’as pas remarqué : les plus productifs sont souvent ceux que tu as à l’œil … » dit Henri « Tu veux dire qu’ils rêvent d’être aimés et travaillent quand ils ne le sont pas ? » « Non, il veut juste dire qu’il ne faut pas se tromper de sentiments… » souligna Doc le vertueux. « Comment ça ? » « Oui, on parle d’amour, ça n’a pas de sens .Ce qui a un sens c’est de souligner en quoi telle ou telle action, réaction, réalisation, … et que sais-je d’autre… contribue à la bonne marche de la maison. »

Doc le vertueux avait étudié la médecine et la philosophie. Il tentait de conjuguer cela avec son job de medco. « Tu veux dire que finalement on pourrait se tromper sur l’intention (on m’aime ou pas) parce que c’est mal formulé ? » « Ben oui. C’est la clef. Tu ne peux rien offrir d’autre que tes paroles… »

Doc leva son verre, savourant sa réplique. « On dira ce que l’on veut, il a un sacré charisme le Doc. » rajouta Félix. « Pour sûr » dit Henri qui n’était pas mal doté non plus. Mireille ne pouvait plus tenir sa langue : « Et qu’est-ce que vous entendez par charisme ? »

Mireille ne buvait pas. Elle sentait comme toujours les esprits des hommes qui s’échauffaient. C’était agréable, ils révélaient plus de sensibilité qu’à l’accoutumée. « Ma petite Mireille », (avec Henri tout était toujours petit) « le charisme, comme Janus, a deux visages. Celui de l’identification, d’abord, c’est-à-dire que tu aimerais être un peu de celui-ci ou celui de l’amicalité, c’est-à-dire le plaisir de travailler avec lui ou elle... » « Et moi, comme cad sup, tu me mets où ? » « Amicalité, sans hésiter » dit Henri. « Tu es de celles sur qui on peut compter. Mais tes cadres pour la plupart, apprécient chez toi qui tu es. Pour elles c’est donc de l’identification. » « Cela s’apprend ou cela s’hérite ? » rajouta Mireille. « Pour l’enfant qui a un modèle tout fait, généralement familial, cela semblerait un héritage même si ce n’est qu’une assimilation ; pour les autres, oui, cela s’apprend. » dit Henri.

Doc intervint : « Ce n’est pas une panacée, le charisme, cela peut même être la pire des choses. Il est au service de qui l’emploie, emprunte son visage et se déploie parfois comme un aigle, parfois comme un vautour. »

Ce Haut-Médoc est un vrai facilitateur pensa Doc.

« Bien sûr » continua-t-il « il ne suffirait ni de lire des publications, ni de suivre des stages de formation. Ton charisme n’obéit qu’à toi seul, à tes propres lois. Tu as des outils et tu le fabriques. Mais tu seras toujours le démiurge et ce sera ta responsabilité. » « Alors tu te condamnes à des rôles ? Zeus pour les reproches et Mars pour aborder la résolution de problèmes ? » Mireille restait un peu sceptique. « C’est une vision dramatique, Mireille. Tu peux aussi appréhender ce nouveau pouvoir avec plus de sagesse. » « Tu veux dire que cela sert à en imposer pour ne pas avoir à imposer *? » « C’est tout à fait cela, Mireille, et … c’est le mot de la fin. »

(*emprunté à François Proust)

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