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Révolutionner les projets de vie individuels en EHPAD ?

Dernière mise à jour : 4 sept. 2023

Sophie réfléchissait.


Animatrice depuis 8 ans, elle voyait bien que ses résidents dans l’ensemble, attendaient sans autre espérance que de gagner par ci par là quelque sursis...

Elle avait le sentiment que les activités trompaient le destin sans jamais y parvenir…

Elle sentait bien que la plupart du temps, ils attendaient… la fin.


Certes il y avait de très bons moments mais personne n’était dupe.

Dans un atelier de réminiscence, un résident avait dit : "A quoi bon, cela ne nous évitera pas de bientôt partir, non ?"

Elle s’était retenue de dire : "justement, profitons du moment présent…".

Elle s’était tue. Elle se sentait coupable, terriblement coupable…

Ils savaient tous, dans ce groupe, que ces ateliers n’étaient pas une fin en soi, que l’on ne faisait que tromper le temps et l’ennui.


Depuis, elle faisait des cauchemars… Toutes les nuits.

La Faucheuse se moquait d’elle, de son rôle de trompeuse, de tenter de leur vendre ce désir immonde d’éternité, de suspendre le temps comme un rêve chimérique…

"Je vous aurai tous, lui criait-elle de sa voix de crécelle, du premier au dernier. Cesse donc de les aveugler… Prépare-les à venir à moi…"


- Vous vivez dans un temps différent, lui avait dit son psy, et vous n’acceptez pas qu’il en soit ainsi… Vos cauchemars sont le prix de votre remord…

- Mais que faire ? lui avait crié au visage Sophie.

- Ecoutez-vous, lui avait-il répondu, comprenez-vous et ensuite, seulement, vous saurez…


Plutôt que d’égrener collectivement des souvenirs, peut-être était-il préférable de construire un récit, de faire émerger une personne une et indivisible, avec des sentiments des raisonnements qui évolueraient sur un temps long… anonyme, bien sûr…


Ces personnages fictifs pourraient-il aider, voire transcender nos chers résidents ?

Une sorte de religion civile, teintée d’un peu de sacré non-religieux, qui émergerait progressivement des consciences collectives et individuelles ?


Se pourrait-il que nos anciens nous montrent encore une fois le chemin, à nous qui cherchons parfois vainement le bonheur au travail ?


Sophie ferma les yeux. Elle dormit d’une traite, jusqu’au matin. D’un sommeil long, profond, serein. Elle ne revit jamais la Faucheuse….

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