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Photo du rédacteurJacques Heurtier

Une soignante normale ?

Dernière mise à jour : 16 juil. 2021

Parfois, je me demande si je suis normale. Depuis toute petite, j’ai toujours eu un caractère un peu pessimiste. Mon cœur se brise facilement. Tenez, il y a encore quelques minutes, la dame du 3B a sonné. Il m’a fallu 20 mn pour trouver le temps… Et aussitôt, la tristesse a fait irruption dans tout mon corps. Il leur reste si peu de temps et je ne peux pas leur en donner assez… c’est tellement déchirant…

Bien sûr, ma cadre me dit que je suis trop sensible mais je crois que j’aurais horreur de faire ce métier sans sensibilité, sans attachement… Je ne peux pas ne pas les aimer… « Sois professionnelle » me dit l’institution, « détache toi… » C’est idiot : c’est comme dire à quelqu’un « ne regarde pas en bas, tu vas avoir le vertige… » Moi, si il me restait quelques mois, j’aimerais que l’on m’aime, j’aimerais de l’affection, pas du professionnalisme. Pour moi, la bientraitance est l’affaire de ceux qui ont du cœur mais n’est pas l’affaire de ceux qui en parlent le mieux.

Si il ne me restait que quelques mois, j’aimerais avoir quelqu’un (un bénévole par exemple) qui me visiterait tous les jours et me lirait du Balzac. Et puis des fois j’ai peur, comme eux. Ils sentent la fin approcher, je le vois dans leurs yeux. Une sorte de frisson mental terrorise mon cerveau, j’ai les jambes vides, je suis saisie dans cette immobilité.

Mon Dieu, que faire de tout cela ? On va encore me raconter que c’est un burn-out, que je ne suis pas assez forte, que je m’expose trop, comme si l’amour que je leur porte était ma destruction. Non, ce n’est pas ça. Je meurs un peu avec eux et plus le temps s’écoule, plus j’ai l’impression de disparaître… S’il vous plaît mesdames et messieurs les directeurs, laissez-nous les aimer, ne nous condamnez plus à être des robots…

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